Avec l’espace sans refuge est une pièce pour clarinette et électronique en temps réel, pour un dispositif de spatialisation ambisonique 2D, composée par Saïd Bonduki et créée par l’élève clarinettiste Emmanuel de Vienne le 23 mars 2016 à la MSH Paris Nord, dans le cadre du festival Mode de jeu en collaboration entre l’université Paris 8 et le Conservatoire de Saint-Denis.
Le point de départ pour cette composition a été de penser une approche pédagogique des modes de jeu et de faire découvrir le domaine des musiques mixtes à un jeune instrumentiste.
Le titre fait référence au côté immersif de la pièce, notamment pour l’instrumentiste, dont le jeu provoque les événements de la partie électronique. Le clarinettiste se trouve seul dans cet espace révélé par le son spatialisé.
Cette pièce peut être vue comme une exploration de l’espace à travers des variations morphologiques des champs sonores, une forme de tentative d’épuisement. Saïd Bonduki parle d’ «appropriation diffuse de l’espace». La notion de morphologie est par ailleurs le point central de ses recherches doctorales.
La spatialisation du son est au centre du traitement en temps réel, et agit comme geste d’archivage du présent. Elle est traitée à l’aide de la librairie HOA, développée par le CICM (Centre de recherche Informatique et Création Musicale). Il s’agit de créer des champs sonores diffus aux morphologies mouvantes.
Du point de vue de la partie instrumentale, la pièce est écrite selon deux types de gestes: un premier où l’articulation des notes et les différentes façons de souffler et de respirer dans la clarinette offrent le matériau nécessaire pour réaliser les changements de morphologies des champs diffus, et un second à l’approche plus texturale et bruiteuse, où des souffles et bruits de clés sont granulés et diffusés dans l’espace.
La manipulation de la partie électronique en concert est très libre. Cela donne donc lieu à des versions toujours très différentes entre les reprises, d’autant plus que le module de spatialisation doit être adapté à chaque nouvel espace, à chaque nouveau contexte. À ce titre, le concert apparaît comme la manifestation asymptotique d’un épuisement d’Avec l’espace sans refuge.
Cela étant dit, Saïd Bonduki préfère le terme «exploitation» au terme «épuisement». En effet, il a «exploité dynamiquement les possibilités d’un matériau projeté dans différentes perspectives». Quand il y a exploitation d’un matériau sonore, par exemple pour tirer parti de sa morphologie, ce n’est jamais une opération destructible, le matériau est toujours réemployable.
Par ailleurs, le compositeur a réutilisé quelques modules de son patch sur Max/MSP pour d’autres créations antérieures. Il n’épuise donc pas ses objets pour un seul projet mais les réutilise comme faisant partie de son environnement de travail et d’écriture pour des projets ultérieurs.
Note de programme:
Avec l’espace sans refuge, pour clarinette et électronique, utilise la respiration comme moyen d’altérer l’espace du son, d’agrandir les dynamiques du comportement sonore dans le milieu électronique. Les articulations sonores de la clarinette sont transformées par l’ordinateur et projetées dans l’espace de concert. À travers le traitement électronique, divers aspects du son souvent peu perçus sont mis en évidence.